Georges

Toutes les belles filles se prélassent
Dans les fauteuils de coton
Et le garçon se lasse
De demander au patron
Si Georges paye ce soir,
Mais Georges ne paye jamais
Parce que c'est Georges.

Et le garçon n'aime pas ça.
Il n'aime pas les Français qui débarquent
Comme ça, par hasard, à Dakar
Et pour Georges tout va très bien, ici.
Il se fout de tout et ce qu'on dit de lui

Et quand la porte s'ouvre,
Des autos qui foncent dans les rues cassées,
Les enfants qui shootent dans une boite en fer,
Un mouton qui bêle, des poules attachées,
Un aveugle chante comme Stevie Wonder,
Les taxis qui attendent devant les bordels,
Le diesel embrume l'humidité.

Les belles filles se prélassent
Dans les fauteuils de coton
Et les couples s'enlacent
Sous les yeux bleus du patron
Qui compte ses ronds.
Au juke-box on entend Julio
Qui n'a pas changé,
Brassens et puis Bob Marley
Et Georges boit sa bière en douceur
En comptant les pales du ventilateur.

Et quand la porte s'ouvre
Les femmes qui rient devant les maisons,
Les enfants qui courent après un cochon,
Des mecs qui se traînent après un camion,
Des machines à coudre, bleues sous le néon,
Des mangues entassées, des beignets sucrés,
Des femmes allongées, des enfants qui dorment

Et Georges se prélasse
Dans ce bordel de coton.
Il sirote sa Flag,
Le regard au plafond,
Et il pense à Paris,
Son appart en plein centre,
A son chien, à son chien,
A son chien, à elle, elle est loin,
Disparue de sa mémoire,
Éliminée, enterrée l'histoire.
Tout va bien pour Georges,
Vraiment tout va bien.

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